mercredi 3 novembre 2021

l'ÉGO ou le soi illusoire

Ou la racine de la souffrance

Lorsque nous arrivons au monde, nous sommes pure Essence, immergés dans l’expérience de notre vraie nature, dans un état de pureté, d’innocence et d’unité.

Puis en grandissant nous devons faire face à des manques (lorsque nos besoins d’amour, de connexion, de reconnaissance ou de sécurité ne sont pas remplis), à des blessures ou des traumas (lorsque notre innocence n’est pas respectée ou qu’elle est abusée).

Avec ces manques et ces blessures puis avec la douleur qui en découle, l’enfant sent qu’il y a un problème, mais ne pouvant avoir la capacité de recul suffisante pour percevoir que la nature réelle du dysfonctionnement vient des gens qui sont en contact avec lui, il pense que c’est lui qui a un problème et installe la croyance de base « il y a quelque chose qui ne va pas chez moi ». 

Il sent en même temps que si il laisse cette croyance exister, cela le rend indigne d’être aimé, et qu’il n’aura donc jamais la nourriture et la connexion dont il a besoin.

L’unité et la confiance sont alors perdues. L’insécurité et la douleur qui en découlent sont si grandes que nous ne pouvons imaginer continuer à rester en contact avec ces blessures, dans un état de vulnérabilité et d’ouverture.

 

L’égo qui s’était d’abord structuré comme un mécanisme réflexif de conscience de soi, se développe alors dans une nouvelle forme : comme un moyen de protection, et il met en place une armure énergétique et psychosomatique (en nous et autour de nous) qui cherche à nous protéger, à compenser les images négatives que les croyances ont créées, et à rétablir l’équilibre perdu.

Cette activité protectrice de l’égo tourne autour de trois grandes orientations, elle cherche :

-    soit à trouver un reflet valorisant de soi dans la relation avec chacun des objets et situations avec lesquels nous entrons en contact,

-    soit à compenser les blessures, manques, et traumas que nous avons expérimentés,

-  soit à éviter d’être à nouveau confronté à ces blessures ainsi qu’à faire face aux croyances négatives qui y sont associées.

 


 

Le maintien en place de cette armure génère une grande activité et crée un filtre qui agit comme un miroir déformant à travers lequel nous évaluons nos expériences intérieures et extérieures.

 

 

 

 

Mais le filtre est basé sur les croyances négatives qui se sont installées, il va donc avoir tendance à interpréter les expériences comme une confirmation de ces croyances négatives. 

 

Ainsi, ce que nous percevons et ressentons n’est plus la réalité, mais le fruit de la projection de ces images de nous mêmes : comme si nous percevions la réalité à travers des verres colorés qui teintent notre expérience et projettent notre monde intérieur dans ce que nos percevons de l’extérieur.

 

Ces projections validant les croyances limitantes déjà installées, l’égo va alors se mettre à lutter contre tout ce qui est vécu, dans la mise en place d’un conflit permanent avec notre expérience.

Ce conflit avec l’existence va générer une grande activité mentale qui va évaluer chaque élément à travers les conditionnements, les filtres et les barrages qui ont été créés : « j’aime/je n’aime pas », « c’est bien/ce n’est pas bien », « cela peut exister/cela doit disparaître », « j’en veux encore plus/je ne veux pas expérimenter cela »…

De là, des stratégies se développent pour essayer de tenir à distance les expériences qui menacent l’équilibre de l’égo, ainsi que pour essayer d’atteindre ce dont il imagine avoir besoin.

Par exemple, dans une situation relationnelle où l’égo se sent insécure, il peut mettre en place une stratégie où il va tenter d’avoir l’air gentil ou aimable pour recevoir de meilleurs signaux des autres personnes, et donc se sentir plus sécure. Il peut aussi choisir d’avoir une attitude agressive ou froide dans le but de de cacher son insécurité, ou de déstabiliser les autres, et d’augmenter son impression de contrôle pour se sentir plus en sécurité. 

Et entre ces deux exemples, on trouve un mandala infini de variations des modes de contrôle possibles et imaginables.

 

Toute cette activité de conflit va occuper la plus grande partie de notre attention, et va générer une contraction énorme dans notre être. Cette contraction va voiler la réalité de notre véritable nature, et nous couper encore plus profondément de notre Essence.

Cette dissociation avec notre être nous amène à nous sentir séparés, divisés, incomplets et insatisfaits – ce qui augmente encore plus le niveau d’insécurité intérieure, et qui nous conduit à imaginer que le meilleur moyen de retrouver un certain niveau de sécurité est de renforcer la structure de protection mise en place par l’égo.

La boucle se referme alors pour nous maintenir prisonniers dans l’identification à cette activité de l’égo qui s’entretient elle même.

 

Pour sortir de cette boucle et des chaines de souffrances qui en découlent, on pourrait avoir tendance à penser qu’il faut détruire l’égo. C’est d’ailleurs ce que certaines voies spirituelles ont tendance à prôner.

Mais la part de nous qui chercherait à détruire l’égo ne serait qu’une autre facette de ce même égo – vêtu ici d’un costume plus spirituel – et qui continuerait, dans sa grande arrogance, d’imaginer savoir ce qui devrait exister ou disparaître. Si on s’engage dans cette direction, on est donc à nouveau piégé dans le conflit intérieur et dans la contraction. On est à nouveau embarqués dans un cycle sans fin de souffrances.

 

Ce qui va nous permettre de nous libérer, c’est de laisser l’expérience être éclairée par la lumière de notre conscience.  

L’égo n’a pas besoin d’être détruit ou transformé, il a seulement besoin d’être vu pour ce qu’il est : une simple activité.

Voir que l’égo est simplement une activité (et pas quelque chose de concret) est la voie qui permet de nous en détacher. Cela crée une distance qui permet de voir au delà de l’illusion que l’égo entretient, qui permet de voir que l’égo n’est pas ce que nous sommes.

En effet, le fait qu’il y ait cette activité de l’égo à l’œuvre – avec ces images et pensées relatives à la personne que nous imaginons être, et le sens de séparation qui va avec – ne signifie pas pour autant qu’il existe réellement en nous une entité correspondant à ces images.

Ces images, pensées, souvenirs, activités réflexives mises en place par l’égo, sont des mouvements qui apparaissent dans l’espace de notre conscience mais qui ne disent rien de vrai sur ce que nous sommes. Ce sont juste des mouvements conditionnés, temporaires et impermanents. Nous existons indépendamment de ces mouvements.

La question à ce poser est donc la suivante : suis-je réellement ces voix ou ces images de moi dans ma tête, ou bien suis-je ce qui les perçoit ?

Ensuite, en mettant ce questionnement en pratique, dans la lumière de notre conscience, la réalité ne peut que se révéler pour nous montrer que ce que nous sommes réellement, c’est ce qui perçoit ces mouvements de l’égo et des pensées.

Revenir à l'expérience directe de notre nature profonde de Conscience illimitée, revenir à une immersion dans l’expérience de l’Être pur, nous permet de mettre un terme à notre association avec l'activité de l’égo.

L’ego n’a donc plus besoin de changer, c’est nous qui, par un retour à notre vraie position, pouvons réaliser que nous ne sommes pas l’entité limitée qu’il nous présente.

 

Plus l’égo sera vu comme quelque chose qui n’est pas vrai (dans le sens où il n’est pas réellement ce que nous sommes), plus il perdra de sa force et de sa consistance, et plus nous pourrons nous ouvrir à un mouvement plus profond en nous, où nos actions, pensées et paroles pourront émerger d’un espace en dehors du cadre limitant dans lequel l’égo nous maintenait.

Nous sommes alors libres d’être ce que nous sommes réellement. 


Patrick BOULAN

 

 

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