dimanche 6 mars 2022

LA LIBERTÉ

La liberté n'est pas séparée de ce que nous sommes

La liberté est intrinsèque à la nature de la conscience, et en cela elle est une des qualités fondamentale de ce que nous sommes. Elle n’est pas soumise à condition, ni dépendante de certains facteurs internes ou externes.

 

Ce qui nous donne la sensation d’être enfermés, divisés ou limités, est en fait lié à une activité de résistance et de contrôle qui nous fait tourner le dos à notre nature profonde et à cette qualité de liberté.

En effet, le mental nous fait croire que si nous arrivons à nous débarrasser de tout ce qui nous dérange, nous perturbe ou nous est désagréable, alors nous pourrons enfin être libres. 

De ce fait, pour la personnalité, la liberté est conditionnée, elle s’envisage comme : « je serai enfin libre quand telle ou telle situation aura changé, et/ou quand je ne ressentirai plus ceci ou cela, et/ou lorsque je serai enfin débarrassé de toutes ces choses que je ne veux plus expérimenter».

Le bonheur et la liberté deviennent alors sujets à condition et projetés dans un futur hypothétique.

 

Ainsi, dans les moments où nous éprouvons de la douleur, de la souffrance, du stress, ou un fort niveau d’inconfort – que se soit sur le plan physique, mental, psychologique ou émotionnel – le programme à l’œuvre en nous va chercher à se débarrasser de l’expérience ou à la changer.

Le Mental/Égo va donc développer, au fil de notre développement, un processus continu de contrôle qui, par un nombre presque infini de stratégies, cherche à résister à tout ce qui est désagréable ou inconfortable, à tout ce qui est perçu comme une menace, et à tout ce qui va déséquilibrer et dévaluer les images de soi construites par la structure de la personnalité.

Ces stratégies  s’activent plus fortement lorsque nous faisons face à une expérience difficile, mais elles se maintiennent aussi en place de façon continue, puisqu’elles doivent, à chaque instant, tenir à distance ou compenser les ressentis qui ont été refoulés.

Ces mécanismes deviennent si habituels qu’ils sont totalement intégrés à notre sens de l’identité, créant ainsi une forme de « fixation » de la personnalité, et focalisant notre attention à a périphérie de notre être, loin des sentiments et ressentis qu’ils cherchent à cacher.


Toute cette activité génère énormément de contrôle ; ce contrôle étant à la source de grandes tensions dans le corps et dans le psychisme. La résistance crée aussi un fort niveau de conflit qui se joue tant vis à vis de nous-mêmes et de nos expériences, que vis à vis des situations et interactions auxquelles nous sommes confrontés. Cela nous amène à nous sentir fragmentés et divisés, à être aux prises avec une forme constante de tension interne, dans l’insatisfaction et la négativité.

Cela nécessite également une grande activité de maintenance et accapare une grande partie de notre énergie vitale. 

Tous ces ressentis négatifs qui sont ainsi évoqués vont renforcer la résistance, renforcer les efforts pour se libérer de ces expériences que l’on imagine être la source de notre souffrance, ce qui nous conduit à plus d’épuisement, plus de ressentiment, plus de désespoir, et ne fait que créer un cycle continu de souffrance.

 

D’autre part, le contact avec ces parts enfouies est de plus en plus ressenti comme une menace, générant une anxiété constante, et nous entretenant dans une forme de dissociation quasi permanente.

De ce fait, nous perdons le contact avec notre profondeur et notre état naturel : d’abord parce que nous avons investi notre sens de l’identité dans les stratégies et mécanismes mis en place pour résister et contrôler ; ensuite parce que revenir vers l’intérieur réveille la peur de découvrir en nous un être déficient ou indigne, composé de l’agglomération de tous ces sentiments, images, croyances, jugements, émotions et expériences que nous avons refoulé et auxquels nous voulons échapper.

Si nous restons sur ce plan de conscience, il n’y a pas de liberté possible et nous sommes piégés dans un cycle continu de souffrances .

 



« La véritable liberté c’est d’être libre du besoin de se sentir bien tout le temps. »

Adyashanti

 

 

 

Mais si nous nous ouvrons à une réalité plus profonde, nous pouvons réaliser que cette souffrance est un des moyens que la vie utilise pour nous montrer que nous ne sommes pas alignés avec notre nature profonde.

Certes la douleur et l’inconfort font partie de la vie, mais la souffrance est optionnelle. La souffrance n’est pas causée par les mouvements difficiles que nous ressentons, elle est la conséquence de cette activité de conflit que le mental/égo maintient avec notre expérience, et de la division intérieure qui en découle.

 

Une forme de maturité spirituelle peut alors émerger, qui nous permet de comprendre que les stratégies que nous utilisons ne nous conduisent pas - et ne nous ont jamais conduit - vers le bonheur et la liberté que nous recherchons (même si elles continuent de le promettre). Elles ne font que maintenir en place ce contre quoi elles luttent. 

Ce principe peut être très simplement résumé : TOUT CE À QUOI ON RÉSISTE PERSISTE.

De plus, nous ne pouvons pas échapper à l’expérience. Nous ne pouvons pas changer ce qui est. Lutter contre la vie pour vouloir en changer le contenu ne peut nous amener qu’à l’échec.

 

Avec chaque expérience, c’est comme si la vie nous tendait une invitation ; dans chaque mouvement elle nous dit : « Peux-tu m’expérimenter aussi sous cette forme ? ». Si nous faisons le choix de nous aligner et de répondre « Oui » à cette invitation, alors s’offre la possibilité d’enfin pleinement s’ouvrir à ce qui est, d’enfin ressentir la douleur, l’inconfort, les émotions, les sentiments, les contractions, les jugements ou les images négatives de nous-mêmes.

Dans cet accueil, nous faisons à nouveau Un avec l’existence. Nous sommes à nouveau alignés avec notre nature profonde.

C’est un moment d’arrêt qui met un terme à la futile fuite en avant créée par le conditionnement, et à la souffrance qui en découle.

Cela produit alors un changement de paradigme : lorsque l’on peut laisser aller la croyance que nous devons nous libérer des ressentis inconfortables et que nous serons libres quand ils auront disparu, on peut s’ouvrir à la réalisation que ce sont les ressentis et expériences qui ont besoin d’être libérés de notre contrôle pour pouvoir enfin être réunifiés au reste de notre expérience.

 

Dans l’espace ainsi créé, la nature de la réalité peut se révéler. Nous allons pouvoir réaliser que ces mouvements contre lesquels nous luttions ne représentent qu’un inconfort ou un désagrément passager, et qu’en étant libérés de notre résistance ils peuvent retrouver leur qualité d’impermanence et enfin œuvrer à leur résolution, puis nous quitter.

Ce qui est au delà de l’identité et des structures de la personnalité construites autour de la résistance se dévoile, et nous pouvons réaliser ce que nous sommes réellement : cet espace de conscience infini dans lequel tous les mouvements apparaissent, durent un temps, puis disparaissent.

Prendre ainsi conscience que ce que nous sommes est le contenant de l’expérience - et non pas le contenu - évoque aussi une sensation de présence qui devient de plus en plus palpable. Plus notre attention s’ouvre à cette présence, plus nous pouvons réaliser que tout ce que nous cherchions à atteindre réside déjà, sans effort, au cœur de l’expérience du moment, au cœur de l’espace libre de notre Être.

Dans la clarté et la simplicité de l'instant présent, cela devient évident de voir et de ressentir que ce que nous sommes est profondément libre : libre de ressentir chaque mouvement et chaque expérience, libre de prendre toutes les formes sans s’en trouver affecté ou changé, libre de ne plus être identifié au contenu réactif du mental.

La véritable liberté se révèle ainsi en nous libérant même du besoin d’être libres. 

 

Patrick 




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